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Analyse de tableau de peinture

Michel-Ange  -  La création d'Adam

L’art a une incroyable capacité à pointer du doigt ce qui ne se voit pas pour que l’on puisse se demander : "Qu’est-ce que cela signifie ?"

Eric BESS (1)

L'art pointe du doigt et nous interpelle. C'est particulièrement le cas avec le célèbre doigt de Dieu pointant Adam peints par Michelangelo di Lodovico Buonarroti. Et justement, que comprenons-nous de cette œuvre magistrale avec seulement ce que l'on peut en voir ? Question de fond qui, 500 ans plus tard, est toujours aussi universelle et actuelle.

Michel-ange - La création d'Adam - 1511

Michel-Ange - La création d'Adam - 1511 - Chapelle Sixtine Vatican - Photo Wikimediacommons (2)

Le grand génie italien de la sculpture et de la peinture, Michel-Ange, propose ici sa vision et sa réflexion sur la créature humaine, mais aussi sur la divinité invisible. Beaucoup a déjà été dit, interprété et commenté au sujet de l'histoire et du contenu de cette œuvre magistrale (2). La "création d'Adam" fait partie d'un ensemble de scènes hautement symboliques où rien n’était laissé au hasard. L'idée de résumer dans la chapelle Sixtine tout le message chrétien était essentielle pour lui et ses comanditaires.

Ma proposition ici est de mettre au jour les tracés de la composition de Michel-Ange avec l'archéologie picturale pour apporter une nouvelle vision de sa "création d'Adam".

C'est une démarche singulière puisque je ne propose pas de décrire ce que vous voyez dèjà par vous-même, comme on peut le lire dans les commentaires habituels, mais je vous invite à une sorte de jeu visuel de décryptage. Jeu qui a certainement été installé par Michel-Ange par l'entremise de sa composition. A vous d'en juger !

Ce fameux index divin, que pointe-t-il ?

Alors que le sage montre la lune de son doigt pour illustrer son propos philosophique, le disciple ne regarde que le doigt de son maître. Le doigt de Dieu peint par Michel-Ange serait-il lui aussi devenu une icône au pouvoir hypnotique et lénifiant ?

Les reproductions dupliquées à l'envie de ces deux mains n'ont-elles pas banalisé une vision de la création de Michel-Ange au point d'en occulter son message profond ? Pourtant cet index divin pointé vigoureusement vers celui d'un Adam lascif soulève bien des interrogations. Même si l'on sait qu'initialement le doigt de Dieu dessiné par Michael-Ange touchait celui d'Adam et que les autorités religieuses ont ensuite demandé à le repeindre disjoint, la question de sa compréhension reste ouverte.

Aussi prenons du recul pour observer ce geste divin et même voir au-delà du cadre de cette scène. En effet, Michel-Ange propose huit index visibles dont un qui touche le cadre de la fresque et l'index d'une main qui pénètre la scène alors que cet ange est hors champ (en bas à gauche de la scène). Or, on sait que ces ignudi (3), ces anges sans ailes, participent pleinement de l'iconographie générale de la chapelle Sixtine.

1 : Eric Bess est un artiste figuratif amériquain, doctorant à l’Institut d’études doctorales en arts visuels (IDSVA).

Il a écrit un article décrivant sa vision spirituelle de cette création d'Adam. http://www.ericbessart.com.

2 : Cette création d'Adam est un des neufs panneaux qui illustrent la genèse peinte par Michelangelo en 1511 :

http://en.wikipedia.org/wiki/Sistine_Chapel Sistine Chapel

3 : les IGNUDI sont des anges sans ailes, des messagers divins, omniprésents, mais impavides face au destin de l’humanité. Avec Michel-Ange, ils participent pleinement au programme iconographique de sa genèse peinte.

Qu'est-ce que Michel-Ange veut montrer du doigt ?

La création d'Adam, les quatres index

L'index droit de Dieu, puis son index gauche sur l'épaule d'un chérubin - L'index d'un Ignudi pointant le bord du format - Autre index rentrant dans la scène

Sortir d'une hypnose c'est élargir sa vision, c'est avoir du recul pour mieux embrasser tous les possibles. C'est aussi avoir une méthode qui sera ici celle de l'archéologie picturale, rigoureuse et précise pour être la plus signifiante possible. Essayons de retrouver objectivement ce que Michel-Ange aurait mis en place dans sa composition. Cette démarche utilise des indices visuels à rassembler comme dans les jeux de pistes de mon enfance. D'ailleurs en procédant de la sorte, il apparait que Michel-Ange semble avoir glissé des indices pour guider son spectateur, comme ceux des doigts : le doigt de Dieu et les sept autres index qui semblent eux aussi indiquer quelque chose !

Élargissons notre vision. Oui, mais jusqu'où ? Par exemple, faut-il prendre en compte les deux ignudi qui encadrent le format ? La question se pose car ces anges hors cadre plongent leurs bras à l'intérieur de l'image.

Michel-Ange semble proposer un indice avec l'ange en haut à droite qui est le seul des quatre à regarder la scène et qui pointe de son index la ligne droite d'une voûte. Ligne qui peut d'ailleurs définir le cadre d'un format.

Michel-Ange - Création d'Adam - le forma

Michel-Ange - La création d'Adam - La flèche blanche montre l'index de l'ange qui définit le cadre de la scène qu'il est le seul à regarder.

Or le format de ce cadre (en blanc) se vérifie plusieurs fois avec les règles et techniques mise au jour par l'archéologie picturale. Nous confirmerons cela tout au long de notre pérégrination.

L'ange indique-t-il vraiment de son index un format dans lequel contempler cette scène ?

La technique des regards des personnages(4) appliquée à cet ignudi (ici la croix en rouge sur son œil droit) montre qu'il regarde à 30° (en vert) son index sur le cadre et à 18° (en bleu) le coin droit de ce format. Ses autres angles de regards s'intéressent à l'index gauche et au pouce droit de Dieu ainsi qu'à la femme de la sagesse(5) et à Adam.

Le regard bienveillant de cet ange répond de façon congruente aux questions posées sur le cadre et le contenu de l'œuvre.

Michel-Ange - Création d'Adam - le forma

Michel-Ange - La création d'Adam - Le regard de l'ange  calé sur son talon regarde le coin du cadre et son index posé dessus.

4 : voir la page : "Les regards des personnages", une des technique de composition révélée par l'archéologie picturale.

5 : La femme tenant le bras de Dieu est vue par les commentateurs comme pouvant être une allégorie de la sagesse, et aussi Marie, ou encore Eve promise à Adam.

L'ange montre un cadre à la relation Dieu - Adam

Quelle est cette relation Dieu-Adam ?

A l'intérieur de ce cadre, ci-dessous à gauche, la règle de composition avec les grilles harmoniques des demi-médianes verticales semble être utilisée par Michel-Ange. Cette grille isole un Adam déjà créé, bien vivant, mais seul et nu dans un petit triangle de terre. Sa solitude terrestre et sa nudité s'oppose à la multitude céleste de personnages entremêlés qui occupe une grande surface dans le ciel. Adam semble léthargique et indolent alors que le groupe divin est soudé, dynamique et volontaire. Peut-on extrapoler que Michel-Ange présente le divin uni dans ses aspects multiples alors que Adam vit l'expérience de la solitude et de la séparation ?

Une autre grille, celle des demi-médianes horizontales à droite, met en place une autre relation : deux points de référence de la première règle de composition, le nez de Dieu et celui d'Adam sont calés sur les lignes de cette grille.

Michel-Ange - Création d'Adam - deux gri

Michel-Ange - La création d'Adam - Les deux grilles harmoniques des demi-médianes.

En effet, le nez tient une place de choix dans l’iconographie religieuse chrétienne. Il peut être vu comme un symbole de l'intuition, du discernement et de la lucidité. Mais un autre sens plus caché de ce nez religieux se précise avec les relations mises au jour grâce à l'archéologie picturale et les lignes obliques de composition.

L'ange montre du doigt une première relation Dieu-Adam

Notre ignudi avec son index posé sur le cadre de la scène, montre également une ligne narrative de composition (en vert). C'est une oblique maitresse(6) qui débute par son orteil droit et relie une série de points de la première règle de composition. Elle met en relation quatre anges, Dieu et Adam au travers d'une série de neuf points majeurs. Principalement, cette ligne descend du nez et de l'index de Dieu vers Adam, passant par son pouce, son genoux et son nombril.

6 : voir sur le site le chapitre sur les obliques.

Michel-Ange - La création d'Adam - L'obl

L'oblique majeur désignée par l'ange met en relation quatre anges, Dieu et Adam avec une série de neuf points.

Cette ligne oblique, vigoureuse et pleine d'énergie, pourrait être qualifiée par le symbole du nez divin, nez qu'il faut relier à une iconographie religieuse catholique. D'ailleurs le nez d'Adam est aussi convoqué avec la règle de composition des obliques parallèles. En effet, c'est avec une autre oblique secondaire que cette lecture se précise (ci-dessous).

Dans la pratique de la composition picturale, une oblique maitresse guide l'emplacement d'obliques secondaires qui lui seront parallèles.

Or une des oblique parallèle (celle au dessus de l'oblique maitresse) pointe le nez d'Adam et le sexe de cet ignudi qui montre le cadre vert. Il est question ici de mentionner le symbolisme sexuel du nez de l'iconographie chrétienne. Symbolisme qui va se préciser avec les autres cadres de lecture qui peuvent se dessiner grâce à d'autres index.

Une autre oblique secondaire, celle en dessous de l'oblique maitresse, est aussi la diagonale du cadre (ci-dessous en vert) pointé par l'ange. Diagonale qui passe par le point de référence de la bouche de la Sagesse.

Ceci semble confirmer l'existence de ce cadre vert de lecture.

Texte en cours de rédaction .....

Capture d’écran 2021-05-03 à 14.53.50.

L'oblique parallèle supérieure pointe le nez d'Adam. Notons qu'une autre oblique est aussi la diagonale du cadre vert et confirme ainsi son existence.

Un deuxième cadre de composition pointé par d'autres doigts ?

Continuons d’élargir notre regard et observons maintenant d’autres index, puisque nous sommes partis sur cette piste. L'ange du haut, en plus de son index posé sur une ligne de voûte, pose son auriculaire sur une autre ligne de voûte. Et justement, l'ange au bas à gauche pose son index sur cette même ligne de voûte ! Le pied d'Adam est également posé dessus ! Ces trois points sont indiqués par trois flèches blanches.

 

Alors que le premier cadre vert était pointé par un index angélique (l'index de l'autorité et de l'affirmation de soi), ce deuxième cadre (en jaune) se dessine avec les auriculaires angéliques, symbole de l'intuition et des arts.

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Remarquons que la main droite de cet ange du bas montre une position en miroir inverse de la main gauche de Dieu. Celle de Dieu est dans la lumière et posée sur une épaule, alors que celle de l'ange est dans l'ombre et posée sur un objet, une corbeille d'abondance. 

Le pouce et l'index de cet ange semblent indiquer une direction, tracée ci-dessous avec une flèche blanche. Direction qui pointe une deuxième oblique maitresse (en jaune) et qui part du coin de ce deuxième cadre en jaune. Cette deuxième oblique maitresse comporte pas moins de cinq points de la première règle de composition, il n'y a à nouveau peu de doute sur l'authenticité de cette ligne de composition.

10 Capture d’écran 2020-03-31 à 12.07.11.png

Texte en cours de rédaction, ...

 

en fait il y a encore deux autres obliques maitresses qui conditionnent deux autres cadre de lecture.

Une des obliques est reliée au chiffre de la bête...

si vous êtes intéressés par la suite, faites moi le savoir !

Merci

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